Photos de Martine, Quitterie, Thierry, Virginie, texte Odile M.
Crampon, le mot-souvenir de cette randonnée magnifique.
Il apparait déjà dans le mail de la veille pour donner les consignes : « Nous aurons un peu de neige en haut ; donc prenez des guêtres pour rester au sec et, au cas où, mettez des crampons dans votre sac. »
Sur le parking de l’Abbaye de Tamié en Savoie à 885 mètres, où se retrouvent les onze fugueurs (36%) et fugueuses, le temps est frais et beau. Pas de neige en vue, sauf sur de lointains sommets.
Est-ce qu’on prend les crampons ? Oui. Et sagement, chacun les met dans son sac en se demandant secrètement s’il ne va pas les porter en vain.
Nous démarrons par un joli chemin montant dans la forêt, face à la porte de la chapelle de l’Abbaye. Un peu plus haut nous découvrons dans un espace dégagé un personnage imposant tenant un panneau « Forêt Domaniale de Tamié », suivons le fléchage « Les Drisons par la forêt départementale », et passons par Sous les Esserts par Le chemin des Géants.
Suit une zone en état de désolation avec des arbres au sol, étêtés, clairsemés avec une explication « 300 Géants sont tombés lors de la tempête du 1er juillet 2019 ».
Quelques animaux et personnages sculptés l’animent ainsi que des messages gravés par les enfants de l’IME d’Alberville. Nous sourions, rêvons ou philosophons à leur vue :
L’arbre tordu vit sa vie, l’arbre droit finit en planche.
Un jour je volerai dit la chenille. Tout le monde se mit à rire sauf le papillon.
Les arbres sont des poésies que la terre écrit pour le ciel.
Puis nous progressons régulièrement par de grands lacets, sur un sentier sec, couvert de feuilles. Pas de vue si ce n’est, à travers le feuillage, sur La Belle Etoile en face.
La pente devient moins forte et nous commençons à contourner le versant. La vue est maintenant ouverte, Nous voyons devant nous, la silhouette de Chaurionde et de la Sambuy, et à notre droite, devinons le Mont-Blanc. La neige fait une apparition parcellaire. Il n’est pas encore question de crampons.
A environ un kilomètre des chalets du Drison, après quelques replis de terrain qui nous cachent la suite et le panneau Sur Combe Noire, la randonnée bascule dans une autre dimension. Devant nous, un grand cirque blanc où nous apercevons plus haut deux toitures engoncées dans la neige. Et au bout de quelques mètres, sans trace, dans une neige ramollie en surface, jaillit : on met les crampons ?
Opération un peu acrobatique où l’entraide est parfois indispensable.
Notre animatrice nous guide avec assurance pour achever nos 750m de dénivelés.
Nous nous installons pour pique-niquer entre les deux bâtiments du Chalet du Drison, gardé de fin mai à fin octobre, avec des dortoirs pour 19 randonneurs. Le gardien associe à son activité d’hébergement une activité pastorale.
Notre animatrice vraiment très dévouée, bataille pour refermer la porte de l’un d’eux trouvée ouverte. Une affiche conseillait pourtant de bien la tenir close pour empêcher les martres de pénétrer.
Pas question d’aller vers le Col du Drison, même si le risque avalancheux est à 1 ce jour.
Nous repartons en plongeant dans la Combe Noire, en trace libre pour retrouver une piste dégagée.
On enlève les crampons ? Oui, cela doit être bon, sans. Mais un fugueur prudent tient à inspecter ce qui se passe après le virage, avec raison. Contre ordre, on remet aux pieds, nos Auxiliaires Vraiment Fiables.
D’autres fausses alertes nous amusent encore dans la suite du parcours. Nous franchissons aussi allègrement deux ruisseaux à gué qui sont peut-être devenus plus périlleux dans les jours suivants. La descente se poursuit sur un sentier agréable du même type qu’à la montée, sonorisée par les cliquetis des crampons boueux suspendus aux sacs à dos.
Des pervenches, des narcisses tapissent par endroit le sol. Nous retrouvons le tronçon du départ au Vallon du Bar pour boucler les dix kilomètres prévus.
Halte à la chapelle de l’Abbaye où une paire de crampons a failli y rester pour la nuit.
Nouvelle halte au magasin pour acheter le fameux fromage Tamié au lait cru et entier qui lors de sa création en 1132 s’appelait le « Port Salut de la Belle Etoile ». Il est toujours fabriqué par les moines assistés d’employés laïcs.
Et enfin, halte au Café des 2 Savoie à Faverges, connu pour son vrai chocolat chaud de notre Enfance de la marque Jeanne Antoinette. Tous ont apprécié le geste de Jean-Louis : pot offert pour son anniversaire et pour le bon accueil que les membres d’AVF lui font.
Crampons. Certains se sont demandé s’ils n’allaient pas en rêver toute la nuit. Mettre, enlever, mettre, enlever… Une des participantes a même avoué dormir avec, comme avec un nouveau doudou. Sans regret, car la neige a gagné les abords d’Annecy pendant la nuit…
Bref de beaux souvenirs grâce aux compétences de Quitterie qui a déjoué avec brio et sans avoir froid aux yeux, les aléas du terrain. Mille fois merci !