Sortie Fréjus le 04-03-2016 organisée par Micheline BEYER. Le texte est de Micheline ROCHE
Après
Aquae Sextiae (Aix-en-Provence) la semaine dernière, c’est à
Forum Julii (Fréjus) que quelques adhérents des AVF ont poursuivi leur découverte des richesses romaines de l’ancienne Province de la Gaule narbonnaise, devenue la Provence. Sous la houlette d’un guide chevronné, disert et fervent de sa ville, le groupe a débuté sa promenade près de l’Office du tourisme avec pour but de découvrir le «
street art », ou art urbain. Comme il s’agit d’un mouvement artistique contemporain qui regroupe toutes les formes d’art réalisées dans la rue, le guide a souligné, pour l’exemple, l’entrée du
Palais de justice dont les parois vitrées sont remplies de feuilles de chêne. On aime ou on n’aime pas, c’est selon ! De même que le détail de l’écorce d’un palmier, photographié de près, peut constituer une sorte d’art et former un tableau intéressant et insolite. Commence donc une incursion passionnante dans l’histoire de la ville dont la naissance remonte à environ la moitié du premier siècle avant J.-C. Sis à proximité de la Méditerranée et des voies de communication qui reliaient l’Italie au Rhône, l’emplacement était idéal pour y fonder une colonie romaine. Jules César voulait surtout supplanter
Massalia (Marseille). Le génie romain s’exprima alors dans la construction d’œuvres, dont les vestiges sont toujours omniprésents dans la ville et ses environs. Descendant l’avenue du XVe Corps d’Armée avec ses hôtels particuliers du XIXe siècle, dont certains en bon état, c’est devant d’énormes tronçons de ruines qu’un premier arrêt s’effectue et qu’on bifurque à gauche, sur un petit sentier herbeux. Ces ruines dont celles d’un aqueduc long de presque 50 km qui amenait l’eau d’une source située à une altitude de 516 m près de Mons. Parfois souterrain, il devenait aérien lorsqu’il devait franchir vallons et ravins au moyen d’arches et il entrait dans la cité en traversant la tour nord de la porte d’Italie. Il continuait sous les dalles du chemin de ronde jusqu’au
castellum divisorium (château d’eau) situé sur la butte du
Moulin à vent qui servait de bassin répartiteur.
Poursuivant sa promenade dans le temps, le groupe chemine à travers places et sentiers en contournant le centre-ville par le Nord. On longe un moment le fameux
Mur, plus récent, érigé à l’époque d’un certain maire. Téléphones, tablettes et appareils-photos cliquent aussitôt sur les couleurs vives des tags qui en ornent la surface. Plus loin, en descendant un talus, on contemple presque côte à côte ruines romaines et HLM que séparent quelque dix-huit siècles. Une trentaine de mètres plus loin, apparaît sous forme de porte un élément structurel de l’aqueduc, à peine retouché et encore en excellent état. Des parcelles de remparts subsistent ça et là sous les frondaisons, flanquées à un endroit de la seule tour restante. Puis on s’arrête devant la vue magnifique qu’offre la place St-Etienne près du cimetière du même nom. Le guide pointe en direction du point culminant de la commune, le
Mont Vinaigre (618 m alt.), hélas caché par les nuages, et nous fait remarquer que trois massifs différents entourent la ville, dont le Massif des Maures, le Massif de l’Estérel et les Alpes plus à l’est. Une descente légèrement abrupte nous amène aux portes de l’Amphithéâtre qui date du 1
er siècle de notre ère. Bâti à l’extérieur des remparts, il s’appuie contre une colline de grès. Sa façade a disparu, mais plusieurs murs sont restés debout. Sa construction est classique avec trois volées de gradins correspondant aux trois classes sociales de l’époque. On pense qu’il pouvait accueillir environ 12 000 spectateurs. Des travaux d’envergure entrepris aux XXe et XXIe siècles n’ont pas toujours été heureux. Les derniers en date ont depuis été interrompus pour raison inconnue. On ne sait s’ils reprendront. Quoi qu’il en soit, le pragmatisme a été l’élément retenu puisque l’endroit attire maintenant touristes et spectateurs venus assister à des concerts, des corridas et divers événements culturels. Quelques mètres après la sortie, on aperçoit au loin les deux colonnes antiques en marbre de Carrare qui proviennent d’une épave romaine trouvée au large de St-Tropez en 1954. Une dernière pierre se trouve à l’entrée d’un parking de la célèbre cité balnéaire et les autorités ne veulent pas entendre parler de l’ajouter aux autres. Elles auraient voulu au contraire que Fréjus leur restitue les deux colonnes. Plus près dans le temps, et située près de là, la sculpture le
Gisant commémore le drame épouvantable qui a frappé la région le 2 décembre 1959 lors de la rupture du barrage de
Malpasset. De petites stèles où sont inscrits les noms de tous les disparus parsèment le jardin que l’on parcourt comme un lieu de mémoire. Une grimpette plus loin, on retourne dans la vieille ville en remontant la rue du Général de Gaulle jusqu’à la Place de la Liberté. Par la rue Sieyès, on arrive à la Place Formigé à partir de laquelle on déambule au fil de petites rues chargées d’histoire et où convergent les adeptes de l’artisanat local. Au-dessus de nos têtes, la flèche de la cathédrale brille de ses tuiles vernissées, les créneaux du baptistère ont toujours fière allure après un léger lifting au XIXe siècle et le ciel bleu nous rappelle que nous sommes bien en Provence. Après un bon chocolat chaud dégusté à la terrasse jouxtant l’Office du Tourisme et un remerciement chaleureux à notre guide, nous nous dispersons pour rejoindre Sainte-Maxime, heureux d’avoir passé une si belle après-midi.
Micheline Roche