Du Jeudi 5 au Lundi 9 Décembre 2019 LE TYROL
Six heures du matin, notre bus se dirige vers Antibes où, oh ! surprise Christelle, « le chat noir », chauffeuse talentueuse et polyvalente, nous prend en charge.
C’est un long voyage. L’Italie retape ses autoroutes. Le temps pour nous de compter une centaine de viaducs et tunnels, de somnoler tout au long du seul plat pays d’Italie, la plaine du Pô et du triste « riz amer », de découvrir le Haut Adige, ancien sud Tyrol dont les clochers d’églises rouges ou verts témoignent de leur appartenance jusqu’en 1920 aux diocèses d’Innsbruck et Salzbourg. Nous les retrouverons partout en Autriche, élancés et familiers.
Une fois atteint le large col du Brenner, grâce à Christelle la descente vers Stans se fait en douceur jusqu’à notre hôtel au charme douillet d’un chalet. De beaux décors de Noël blancs et argentés accueillent le visiteur. C’est la classe.
Chacun aspire à un juste repos mais c’est sans compter avec le tintamarre qui précède St-Nicolas, sa clique de monstres poilus et cornus venus attraper les enfants dissipés .Nous voici plongés d’office dans une tradition omniprésente et authentique.
C’est à Salzbourg, berceau de Mozart que se découvrent à travers l’art baroque les fastes des Princes-archevêques. Palais et jardins destinés aux favorites ; une immense forteresse du XIème perchée sur l’une des 3 collines réservées à ces princes et à la noblesse ; la cathédrale St-Rupert aux 7 orgues qu’Hayden et Mozart pratiquèrent. Joseph Mohr compositeur de « stille nacht » notre « douce nuit » y fut baptisé comme Mozart. En cheminant au gré de cette ville mythique, comme un soleil la maison de Mozart s’offre à notre souvenir, tout comme celles du physicien Doppler, de Von Karajan, de Stefan Zweig.
A Innsbruck ville de charme et de couleurs, se perpétuent comme à Salzburg cet art baroque ainsi que de magnifiques enseignes tout au long des rues animées de commerces. Il est temps de refaire connaissance avec les Habsbourg, Maximilien 1er grand stratège qui ouvrit la voie à son petit-fils Charles Quint, Marie-Thérèse mère de Marie-Antoinette qui mit en place un enseignement gratuit tout en favorisant les arts et les fêtes.
Ces fêtes et ces marchés de Noël que nous abordons avec étonnement en ce temps de l’Avent, si important au Tyrol, ont peu à voir avec les éclairages, les étalages souvent clinquants de nos régions. Ici, ou plutôt là bas, tout reste dans la tradition de Noël. Nous avançons sereinement au milieu de branches de sapin, de grappes de boules rouges, de couronnes de l’avent, le long d’un chemin d’étoiles découpées dans du sapin menant à l’église « kinder sind wie sterne in dunkler nacht » : les enfants sont comme les étoiles dans la nuit sombre.
Les étalages ne présentent que des produits d’artisanat local ou presque. On se régale de chocolats à la frangipane à l’effigie de Mozart partout exposée à Salzburg, on goute en toute sérénité le fromage de l’alpage et ce cake compact aux fruits secs. Tout comme ces familles, ces amis, que l’on croise et qui, dans la gaîté, partagent autour d’une buvette improvisée : bière, vin chaud et petit pain à la choucroute. Il y a beaucoup de monde mais aucune bousculade. L’ambiance est bon enfant et nous en sommes.
A Hall in Tyrol, chaque jour de l’avent est projeté sur les murs de ce bourg médiéval, le 24 étant réservé au clocher de St-Nicolas, à son pied 4 cuivres- musiciens jouent des cantiques. Il arrive que des anges s’adressent aux badauds dans ce très catholique pays. Aux pignons des demeures quelques personnages de légendes sont suspendus, sans doute dans l’attente d’un conteur pour enfant.
Que dire de cette belle balade dans l’alpage, chaque calèche menée par deux chevaux, et cinquante personnes emmitouflées dans de chaudes couvertures. Il ne fait pourtant pas si froid.
Le rythme est lent, le temps est presque arrêté, la notion de tout ce qui fuit s’est envolée, nous voici entourés des plus hauts sommets du Tyrol. Cependant, le paysage est ouvert et la lumière bienfaisante. Qui ne penserait pas alors au bonheur que ressentait Sissi dans ces montagnes qu’elle chérissait ? Sensation de calme et sérénité, étape dans un chalet où nous attendent biscuits de l’Avent, vins ou chocolats chauds. Le feu brule dans la cheminée. On resterait volontiers plus longtemps. Avec regret, il nous faut repartir : La vallée de l’Inn nous attend, car nous sommes loin d’avoir tout vu !
Cette riche vallée dont les salines firent dès le XIII°s sa réputation en Europe : une manne pour la conservation des aliments. Ainsi on y frappa monnaie : le thaler, à l’origine du dollar, dit-on. Deux mondes s’y côtoyaient. Les places assises en église étant réservées dans la 1ère nef à la bourgeoisie, les ouvriers se tenaient alors debout dans une 2ème nef au décor plus sobre.
L’être humain oublie très vite les côtés sombres, la rudesse de la vie quant il n’y est pas confronté.
La forêt magique de Swarovski, entrevue à la tombée de la nuit, parée des couleurs de l’arc en ciel, s’estompe, puis s’éclaire des couleurs de l’espoir. Un lumineux souvenir : que tous ces moments partagés dans la bonne humeur se prolongent…
N’oublions pas Christelle, notre vigilante chauffeuse, « chat avisé », qui nous facilita les accès à ce monde d’une enfance retrouvée.
Brigitte Perrier