Si Guillaume le Conquérant est bien présent dans l’Histoire de France, il n’en est pas de même pour un autre normand, Roger de Hauteville. Ce duc de Sicile, des Pouilles, de Calabre, de Naples et de Bénevent est, en application d’une bulle pontificale, couronné roi à Palerme en septembre 1130 sous le nom de Roger II. Pour le situer dans le temps, son grand-père Tancrède (990-1140) était un petit seigneur de Coutances et son petit-fils est Frédéric de Hohenstaufen empereur germanique et roi de Sicile (1194-1250).
Son histoire est le fruit des belles aventures menées par de jeunes chevaliers normands cherchant fortune et gloire à leur retour de pèlerinage à Jérusalem dès 1009. L’Italie était en grande difficulté de gouvernance, à la fois terre byzantine et présence musulmane au sud de Rome, sous la pression des cités lombardes au nord et la papauté était souvent peu écoutée. Une émigration normande répond à une demande, soit de vaillants guerriers mercenaires au service de ducs qui se querellent ( Bari, Apulie en 1016). Ce sont deux fratries qui viennent alors vers Amalfi et de succès en succès se voient attribuer des villes, des titres de comtes et des terres. Les Hauteville seront cinq frères à venir, trois en 1035 , puis un, et un autre encore en 1057, tous venus s’engager. Ils vont guerroyer, se faire connaître et reconnaître, obtenir des titres et les terres conquises seront apaisées et rendues à la religion de Rome avec l’éviction de Byzance l’orthodoxe et de l’islam en Sicile.
Par le jeu des successions, Roger, né à Melito en 1095 est reconnu souverain de toutes les terres normandes qu’il va unifier depuis la Sicile. Si l’on peut parler d’un état fruit de conquêtes, il faut admirer comment ce nouveau modèle politique, où tous les éléments féodaux et les cultures différentes sont préservés, est une exception qui a suscité une grande admiration et reçu le nom de ‘état œuvre d’art’. A la politique de prestige sur le plan international, de consensus avec la Papauté en difficulté de schisme, Roger a su être un souverain éclairé dont la cour savait faire une place aux sciences, à la poésie et à l’art sous toutes ses formes.
Tout voyage en Sicile ne peut que refléter ce moment d’histoire construit par des aventuriers normands.
Andrée DESMOULINS