Du canal des Pharaons au canal de Suez :
4 000 ans de l’histoire de l’Egypte, pour arriver au canal de Suez. Car tout finalement converge vers ce rêve fou qui a pu se concrétiser à travers les ambitions de quelques visionnaires armés d’une volonté farouche. D’aucuns diront qu’il s’agit d’un projet pharaonique. Ils n’auront pas tord.
Dans l’antiquité, l’Isthme de Suez était déjà parcouru par un canal, creusé dans la partie désertique de la région, à l’est du Caire actuel. Les bateaux venant de la mer rouge pouvaient ainsi gagner le Nil et joindre la Méditerranée au travers d’un bras du Nil. On rêve à ces frêles embarcations qui plongeaient dans le sud secret, vers le mystérieux pays de Koush revenant chargés de produits exotiques. Les Perses et les Romains en occupant successivement l’Egypte ont travaillé au désensablement de la voie d’eau ouverte par les pharaons.
L’ouverture de la route des Indes par Vasco de Gama en 1498 va bouleverser le transport avec l’extrême orient. Dès lors, il est apparu comme une évidence que percer l’isthme de Suez permettrait de réduire davantage encore le temps de transport. Cette idée frémit dès la Renaissance, Colbert ce fou des canaux en rêve, et Napoléon se précipite en Egypte pour soit disant combattre les Mamelouks, en recherchant les trace du canal des Pharaons. Dès lors, tout va s’enchaîner avec les études initiées par des ingénieurs venant de France. Mais il faudra la témérité de Ferdinand de Lesseps pour mener à bien ce grandiose projet.
A travers vents et marées, le projet prend corps. A l’origine, la Grande Bretagne ne voyait pas d’un bon œil ce projet qui pouvait concurrencer son leadership avec les Indes et l’Extrême Orient. Mais les travaux avancent. Les débuts seront particulièrement difficiles. Les fellahs, au nombre de 20 000 à 30 000, doivent souvent commencer à la main, dans une eau peu profonde pour creuser un sorte de rigole et permettre aux excavatrices venues de France d’intervenir. Les travaux dureront dix ans de 1859 à 1869. Les péripéties financières n’ont rien à envier aux travaux de creusement du canal de 162 kilomètres à l’origine, dédoublé partiellement en 2015 pour atteindre près de 193 kilomètres aujourd’hui. La compagnie de Suez a transformé le fameux désert inhospitalier de l’isthme de Suez en un territoire animé par le canal maritime entre les deux mers, le canal d’eau douce, alimenté par les eaux du Nil, les terrains agricoles, les plantations, les réseaux routiers et de chemins de fer, les ports et les villes environnantes.
Jean-Claude Valantin