Le Jeudi 30 Juin, notre journée à CREIL-MONTATAIRE en Picardie n’a pas manqué de « piquants ». Nous arrivons sous la pluie qui nous accompagnera toute la journée. Le propriétaire du Château nous attend devant la Collégiale avec une imposante clef .
                                    
*La bâtisse du XIIè siècle a été classée en 1862 aux Monuments Historiques. Nous franchissons un beau portail en ogive soutenu par 4 colonnettes de chaque côté.Nous entrons par la partie romane, plus basse, avec un très beau plafond de bois, en coque de bateau renversée. Le sol présente encore des terres cuites décorées et des pierres tombales. Des colonnes renforcées de 4 colonnettes soutiennent la voûte. Elles présentent des chapiteaux très travaillés où apparaissent phénix, dragons, oiseaux. L’un, en particulier, montre un rapace et un lézard pour commémorer le mariage du Comte de Clermont avec la fille du Roi. La pénombre de cette partie contraste avec la luminosité de la partie gothique aux hautes colonnes élancées avec des clés de voûte à décor floral. Certains chapiteaux conservent des traces de polychromie verte, bleue, rouge, notamment autour de la Chapelle de la précieuse Vierge à l’Enfant du XVIè s. Les vitraux très colorés, nous content la vie de Marie. Signalons aussi un beau confessionnal ouvragé du XVIè s. Le choeur, aux murs richement garnis de colonnettes reliées par des décors trilobés, est surmonté par un plafond bleu étoilé qui mériterait une restauration….L’autel de pierre, très sobre, est gravé finement de phénix et dragons. Une particularité : au fond de la partie romane s’ouvre la porte d’une chapelle protestante créée par les Condé, sous le Premier Empire. A l’extérieur, sur un mur latéral, une entrée avec un portail à l’Annonciation dont les personnages ont été décapités pendant la Révolution, permettait aux Seigneurs de passer du Château ,en contrebas, à l’Eglise. La couverture de l’édifice conserve les pierres d’origine. Un clocher massif était autrefois aussi la Tour de Guet.
                          
*Nous descendons ensuite vers le Château de Montataire en passant devant une imposante fontaine du XVIIIè s, érigée en l’honneur du Jubilé de Diamant de la Reine Victoria. Construit sur une motte castrale, il a été précédé par un château fort, édifié au XIè s, par Hugues de Clermont, après une donation royale du roi Robert le Pieux, fils d’Hugues Capet. De 1466 à 1756, les Madaillan de Lesparre, originaires de Gascogne, proches de Henri IV qui y avait sa chambre et y séjournait, restaurent et mettent le Domaine au goût du jour. Ils font construire les Ecuries, la Chapelle, la Salle d’armes…Odet de Coligny, évêque de Beauvais, y séjourna fréquemment. Madame de Sévigné en parle également dans ses Lettres . Massif avec ses 4 tours, il garde un aspect un peu rude. Nous pénétrons par le bas du Donjon reconstruit en partie à la Renaissance. Il a conservé de belles voûtes d’ogives. Au rez-de-chaussée, la Salle des Gardes où l’on inscrivit sur les murs : « Dieu soit en aide à Montataire. Que les bonshommes d’armes, s’il y a la Paix, ils peuvent s’ébattre et se distraire comme gais agneaux… » Il existait des passages et des escaliers, à l’intérieur de l’épaisseur des murs, qui permettaient de s’y déplacer et éventuellement de s’enfuir par les souterrains… Nous visitons ensuite successivement, dans le logis -Une salle de bain de 1870, en faïence de Creil, rose et blanche. Elle était équipée d’un poêle-chaudière et d’une baignoire du XIXè s, à pattes de lion  -Une grande bibliothèque qui a eu jusqu’à 4000 livres, au XIXè s, avec les Barons de Condé.  -La Salle à manger, remeublée en style empire avec de la vaisselle ancienne et un élégant meuble « Retour d’Egypte ».-La Salle d’armes réservée aux Chevaliers présente un plafond polychrome du XVIIè s. Sur les poutres peintes, on voit des blasons à couronne de marquis. On s’arrête devant la grande cheminée en bois peint, avec un écusson dans lequel apparaît le Château autrefois.
                                          
* Nous reprenons le car pour rejoindre le restaurant »Le FLORE » dans la Faïencerie-Théâtre. Le raffinement des plats rendra ce repas inoubliable : -petit flan bicolore d’asperge et de saumon présenté avec des asperges  -saumon très moelleux avec sauce hollandaise et petits légumes  -une savoureuse cabosse composée d’une mousse de chocolat très parfumé.                                                                                                             *Nous reprenons le car pour visiter l’usine de clous Rivierre à Creil. Cette ville, carrefour routier, à proximité de l’Oise, près de canaux, avec une gare sur l’axe Paris-Lille créé en 1846, se développe au XIXè s. De nombreuses industries s’y installent, la ville se développe dans le bassin Creil-Nogent. En 1921, on compte 34 grandes usines avec 10 à12000 ouvriers. La métallurgie domine.La fabrication des clous n’avait pratiquement pas évolué depuis l’Antiquité. Fabriqués manuellement à partir de plaques ou de fils métalliques, coupés à la bonne longueur, limés pour faire la pointe, frappés pour former la tête….Les premières machines, au XIXè s, permettent de travailler plus rapidement .La fabrication, à Creil, de fils de fer et de pointes commencent en1875. En 1888,Théodore Rivierre rachète une boulonnerie et commence la fabrication de clous à partir de fils de métal. L’outillage, les machines, tout est inventé, créé, réparé sur place.Les réglages sont délicats et fréquents. Encore actuellement, les secrets de fabrication sont jalousement protégés.Une grande variété de clous apparaît :–clous annelés pour palettes, difficiles à extraire. –clous en acier galvanisés carrés.–clous pour vieux gréements à l’oxyde de zinc imperméable,–clous vieillis pour les monuments historiques,–clous en acier inoxydable pour moules de bouchot,–clous en aluminium pour les forestiers,–semences de cordonnier,–de tapissier,–clous pour les dominos de Méru,–clous en inox pour les bardages………et bien d’autres à la demande!!
                         
*Quand Théodore Rivierre décède à 44ans, sa femme de 27 ans, veuve avec un enfant de 3 ans, reprend et mène l’entreprise avec compétence. Patronne exigeante mais bienveillante, elle forme et sélectionne ses ouvriers sur place, crée une Caisse de Retraite en 1914, une Caisse d’Entr’aide maladies et décès, une coopérative de vente de denrées et objets de première nécessité comme alimentation, vêtements, charbon, lessive…En 1920, des Jardins ouvriers sont aménagés et mis gratuitement à la disposition du personnel. Les concours organisés permettent de gagner du matériel de jardin. Vers 1900 apparaissent des cités-jardins pour loger le personnel. En 1945, un Comité d’Entreprise est créé. Marie Rivierre décède en 1937, Paul abandonne le Conseil d’Administration en 1934. Cependant la Clouterie Rivierre dure et est actuellement la seule en Europe.Elle préserve jalousement ses secrets (interdiction de prendre des photos, site très protégé). L’entreprise a une excellente stratégie commerciale et sait se diversifier si nécessaire : pendant la crise du Covid, ses productions de clous ayant diminué, elle s’est lancée dans la fabrication de gaines respiratoires à ressort métallique pour l’hôpital, par exemple…

Merci à Joël pour son excellente organisation.

Texte de Nicole Forest, photos de Marc Grouzard, mise en page de Charles Delbarre